Trois catégories de lettres personnelles à en-tête de personnalités françaises


Un bref voyage dans les lettres autographes signées, les fameuses L.A.S des salles de vente, suffit à démontrer combien les lettres à en-têtes ne sont pas réservées exclusivement aux entreprises et aux administrations. Elles sont même, pour toute personnalité qui se respecte, le signe d’une certaine distinction. Et n’allez pas croire que ces lettres personnelles à en-tête ne sont qu’un vestige de temps passés. Elles se rattachent, en fait, à une longue tradition et leur pratique est toujours bien vivace aujourd’hui, aussi bien dans le monde politique que dans le monde des arts et des lettres. Ajoutons qu’il n’est pas nécessaire d’avoir reçu le prix Nobel pour y recourir. Il suffit simplement d’avoir le souci d’exprimer son sens de la qualité par les aspects formels de sa correspondance. Et indéniablement, ceux-ci passent par son en-tête. 

Lettres personnelles à en-tête minimaliste

Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple, très simple même. De nombreuses lettres personnelles à en-tête de personnalité se contentent de rappeler simplement le nom de la personne signataire. C’est très chic et de bon ton. Rien d’ostentatoire, mais la certitude de valoir ce que l’on est.

Prenons, par exemple, une lettre personnelle à en-tête écrite par l’écrivain français, d’origine italienne, mais aussi producteur de télévision, Louis Calaferte

 

L.A.S Louis Calaferte

 

Simple, non ? Mais, supprimons le nom patronymique imprimé en haut de la lettre, c’est quand même nettement moins bien. Et pourtant d’un point de vue graphique, il n’y a rien de plus minimaliste ! On peut donc se dire, Ah quand même, se faire imprimer du papier à en-tête, juste pour mettre son nom, c’est bien cher payé.

Sauf qu’en l’occurrence, il s’agit aussi de communication. Et que dès lors qu’on joue un rôle public, d’une manière ou d’une autre, l’absence d’en-tête sur une lettre personnelle peut aussi passer pour de la désinvolture ou un manque d’estime de soi

Après tout, comme le disait André Mathieu, artiste, écrivain et romancier : 

Ce n’est pas égoïste de vivre pour soi-même. Une personne qui n’a pas l’amour de soi ne peut donner de l’amour aux autres.

Vu le nombre de personnalités, d’ici et d’ailleurs, qui ont fait comme Louis Calaferte, le message a été bien entendu. Citons entre autres, Charles Chaplin, Alfred Hitchcock, Isaac Asimov, Houdini, Franck Sinatra, Elvis Presley, etc.

Pour ce qui est de ce dernier, il remporte la palme de l’en-tête minimaliste, puisque certaines de ses lettres personnelles n’affichaient qu’un seul mot en en-tête : Elvis.

Lettres personnelles à en-tête blasonnée

Ce sont les plus fréquentes. L’en-tête y reproduit un signe, un emblème ou un dessin, caractéristique de la personne commanditaire. Si le nom patronymique reprend, par exemple, le mot Lion, il est ainsi courant que l’en-tête correspondante corresponde à une effigie rappelant un lion.

En-tête « château »

Evidemment, si on est l’heureux propriétaire d’une vieille demeure, on peut s’inspirer du papier à en-tête de Henry Gauthiers-Villars (1859-1931) de la fameuse maison d’édition Gauthier-Villars, et le non moins fameux signataire des 6 premiers romans de Colette, sous le nom de Willy. Entre autres. Puisqu’on dit qu’il a fait le même coup à d’autres auteurs ou artistes célèbres comme Tristan Bernard ou Francis Carco.

 

L.A.S de Willy
 

En tête blason

Nul besoin d’appartenir à une famille nobiliaire pour avoir son blason personnel. Les ex-libris des bibliophiles avertis sont là pour en témoigner. Mais, avant de se plonger dans les arcanes de la terminologie propre à l’héraldique, on peut peut-être se contenter de s’inspirer du papier à lettre à en-tête de la grande et célèbre comédienne que fut Sarah Bernhard (1844-1923). 

 

L.A.S Sarah Bernhardt

 

Lettres personnelles à en-tête politique

Là, il ne s’agit pas de jouer sur le nom du commanditaire, mais plutôt sur ce qu’il ambitionne. Pour ça, on peut se servir, notamment, des signes allégoriques bien connus des peintres classiques.

Lettre personnelle à en-tête allégorique

On en a un très bel exemple historique fourni par Bonaparte, pas encore Napoléon, et ambitionnant de prendre la place du Directoire. On est dans les mois qui précèdent le coup d’Etat du 18 Brumaire (9 novembre 1799).

 

L.AS Bonaparte

 

Aujourd’hui, incontestablement une telle en-tête est l’illustration même de ce qui est kitsch. Mais, là n’est pas l’important. Ce qui l’est, par contre, c’est l’usage des signes allégoriques, ou de tout autre signe sémiotique, qui, lui, est indépendant des modes. Voilà ce qu’en dit une analyste très avertie

L’armée victorieuse a pris les traits d’une Minerve jeune, belle et décidée. Le lion et le griffon qui ornent son siège, les feuillages de chêne et de laurier, l’entourent de symboles de force, d’intelligence et de gloire.

Et pourquoi tout ce travail effectué par Andrea Appiani, artiste napoléonien, s’il en fut ? Parce que, répond notre analyste :

Bonaparte fait de la politique comme il fait la guerre.

Autrement dit, la lettre personnelle à en-tête allégorique est tout simplement une lettre de propagande. Elle peut être kitsch comme ici, mais son intention est, on ne peut plus, moderne.

Lettre personnelle à en-tête du candidat à une fonction élective

Certes l’allégorie est signe, dès lors qu’elle fait sens, mais le recours à la sémiologie, ou sciences des signes, est plus approprié quand on parle de ces lettres personnelles à en-tête de personnalités politiques, au sens large, contemporaines.

Malheureusement, si l’idée est restée, il est peu fréquent que ces lettres soient travaillées comme celles de personnalités plus « artistiques ». Ainsi qu’on peut le voir avec la lettre personnelle à en-tête de François Mitterrand, lors de sa candidature à une élection présidentielle. Ancienne, il est vrai !

 

L..A.S François Mitterand

 

Et, à défaut, on peut aussi se servir du papier à en-tête de l’institution à laquelle on appartient. Usage fréquent et ancien ! On le comprend, ça pose ! Tant qu’à faire, on peut même y ajouter sa photo, comme Gambetta. 

 

L.A.S Gambetta

 

Mais, encore une fois, on peut tellement faire mieux. Et un petit détour via les symboles, couleurs et autres, qui marchent aujourd’hui et l’aide d’un bon graphiste, on peut faire quelque chose d’équivalent à la lettre personnelle à en-tête de Bonaparte, qui marque, et de bien adapté à notre époque.

Ce qu’il faut retenir 

Un lettre à en-tête n’est pas réservée aux seules organisations, privées ou publiques. Entre les lettres personnelles à en-tête minimaliste, blasonnée ou de propagande, beaucoup de modèles sont possibles. D’évidence, elles renforcent le statut de la personne signataire.

Et si, par aventure, on manque d’inspiration, on peut toujours faire appel aux graphistes de sites d’imprimeurs professionnels. Ou encore suivre les modalités de la composition d’une lettre à en-tête spécial entreprise. 

Mais, peut-être faut-il laisser le dernier mot à Jules Renard qui disait fort justement : 

Quand tu écris une lettre, pense que, sous le sceau du secret, elle sera communiquée à tout le monde.

Raison de plus pour qu’elle soit parfaite. 

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